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Concernant Lee Green, détective privé :

On arrive à priori sur un sujet déjà exploité jusqu'à la moëlle dans le domaine du cyberpunk (la condition humaine face à la machine, la suprématie corporatiste...), mais il serait dommage de s'arrêter là dessus, tant le traitement des personnages est singulier, et leurs interprètes talentueux.

Quant à la mise en scène, travaillée plan par plan (à mon avis), elle n'est pas traitée à la légère. Conséquences : un montage chronométré, ni trop long, ni trop nerveux, qui ne laisse personne sur le carreau. Enfin presque. Car il suffit de décrocher quelques secondes, et c'est le drame, on ne comprend plus rien. Une écoute supplémentaire est, à mon avis encore, nécessaire pour saisir l'entièreté des enjeux.

J'aurai personnellement apprécié quelques mises en valeur plus immersives. Le montage est loin d'être plat, mais il me semble "formaté" (terme non péjoratif dans ce contexte), à un point tel qu'il manquerait presque une "patte" singulière, ce petit quelque chose qui laisse une trace dans la mémoire.

Toutefois, dans son ensemble, Lee Green reste une création plus que valable, plus qu'acceptable, et mérite amplement de ne pas passer inaperçue dans cet océan de créations sonores.

Concernant i h o k a n e : sous un ciel rouillé :

Artistique : Un "one-shot" immersif dans un univers digne de Philip K. Dick, où l'histoire se déroule petit à petit sous nos yeux en même temps que le narrateur-personnage nous la raconte (grâce à la voix envoutante de Reuno SN), de son point de vue. Ce qui laisse à chacun d'entre nous le soin d'imaginer ce qu'il se passe. L'atmosphère est pesante, les couleurs sombres et les bruitages et la musique omniprésents. On notera toutefois quelques grosses longueurs, excusables si l'on prend le temps de mettre un casque sur les oreilles, allongé, yeux fermés pour se détendre.

Technique : Les bruitages et la musique de ce one-shot sont mixés impeccablement afin de ne jamais se retrouver à écouter "un paquet de bruits", bien que certains passages, un peu longs, nous fait nous interroger sur ce qu'il s'y passe réellement. Tout est à sa place, il n'y en a jamais trop, jamais pas assez, David Uystpruyst a le sens du détail. La voix du narrateur n'est jamais dérangée, recouverte. Le montage est très aéré, la gestion de la dynamique impeccable, rien n'est laissé au hasard, ce qui fait d'ihokane un chef d'œuvre audio de la science-fiction cyberpunk.

Concernant XENOZIS :

Xenozis se démarque par sa réalisation inédite, qui donne un bon coup de pied aux fesses des conventions habituelles de la sagasphère, et tend à devenir une référence. Néanmoins, elle ne souffre d'aucun décalage susceptible de semer l'incompréhension chez l'auditeur, pour peu que celui-ci s'accroche à l'intrigue. Car oui, il faut s'y accrocher. En effet, le concept de Xenozis s'impose par son atmosphère sonore trash, brutale, agressive et dérangeante, il a donc légèrement tendance à prendre le dessus sur l'histoire.

Mais si la direction artistique reste un choix délibéré qu'on veut apprécier, l'intrigue elle, reste longtemps en suspend. On nous sert des personnages adolescents torturés, dans un univers de science-fiction étouffant, ravagé, violent et totalitaire, sans pour autant sentir de progression émotionnelle. On se contente simplement d'un contexte enrobé de fils barbelés, de ravages cérébro-parasitaires et de musique industrielle servie par un artiste aux ongles longs.

Techniquement, le bordel sonore ambiant n'en est pas moins soigné et n'est heureusement pas une excuse lancée pour justifier une méconnaissance de montage / mixage. Ouf, c'est donc une "déconstruction" sonore délibérée.

Xenozis est donc une œuvre sonore qui fait mal (au cerveau et parfois aux oreilles), mais dont on espère que la suite nous sortira de la constante torture que le réalisateur nous inflige autant qu'à ses personnages. La démarche incitant l'auditeur à souffrir pour rentrer dans l'univers du réalisateur est ambitieuse et constitue une expérience à part entière que l'on choisit ou non de tenter, mais elle ne demeure pas moins douloureuse au fur et à mesure de la progression.

De manière plus personnelle, c'est un coup de cœur, parce que "ça vient avec des grosses gonades pour te mettre un gros pain dans ta face". Et ça, ça fait du bien, j'en voudrais plus souvent. Mais c'est mon coté masochiste qui parle.

Concernant La Libellule d'Acier :

Artistique : Il fallait oser, car l'idée est géniale. La Libellule d'Acier se présente comme un documentaire-(science-)fiction. Le ton journalistique, façon docu animalier, nous présente cet insecte mécanique dans son environnement, avec la voix de Reuno SN (i h o k a n e : sous un ciel rouillé, du même auteur). Dans une habile et audacieuse présentation de cette anisoptère artificielle bercée par des bruitages inattendus, on est tantôt étonnés, tantôt attendris par la complexité de son mode de vie inventé par David Uystpruyst. La Libellule d'Acier est donc une expérience captivante, à écouter.

Technique : Difficile d'adapter un documentaire animalier sous forme audio, et pourtant, le pari est réussi. Les codes du documentaire sont respectés, la technique nous est servie par un professionnel du son. Les bruitages sont crédibles, et ce qui est surprenant, c'est la facilité avec laquelle nous arrivons à identifier ces bruitages puisque leurs mise en forme n'existe pas dans la vie réelle. Cette identification sonore attribuée à la libellule nous laisse donc penser que ce documentaire ne pouvait être que sonore, tant l'image ici serait presque impertinente.