Netophonix - Le forum

Faire une suite? Elle?

Sinon, de mon coté, j'ai beaucoup de problèmes pour lire des histoires, donc je déteste lire en général. Mais là, j'ai adoré ^^

thetchaff : Heuuuuu...

Celebo : Ça, c'était méchant. Et puis d'abord, je l'ai, la suite ! Je vous la posterai quand ça sera relu/corrigé/affiné/répétition enlevées...

Merci beaucoup !

Je me permets un double post pour remonter le sujet, étant donné qu'en éditant pour poster la suite, ça ne marche pas.

Et hop ! Une après-midi devant un écran, enroulée dans une couverture, et voilà !

[center]_____________________________________[/center]
Novinha ferma les yeux.
Les rouvrit…
… les referma. Inspira un bon coup avant de tourner son regard vers le petit garçon immobile qui la contemplait, plein d’incertitude. Chassant de son cœur toute ombre de répulsion qui aurait pu s’y glisser, la jeune femme prit avec vigueur la main menue de l’enfant et le regarda bien en face, sans ciller, sans se détourner.
- Tu n’as pas à avoir peur de moi, murmura-t-elle. Sur tout ce que j’ai de plus cher, je te jure que je ne t’abandonnerai pas. Qui que tu sois. Tu me comprends ?
Il hocha timidement la tête, les yeux brillants. Novinha allait sourire lorsqu’une grimace catastrophée se peignit sur ses traits.
- Par le sang des dieux, ce que je suis bête ! s’exclama-t-elle. Tu dois avoir froid… Et moi je parle, je parle…
Pestant contre elle-même, elle retira son long poncho de laine grise et le lui passa délicatement autour des épaules. Surpris, il esquissa un geste de défense avant de se rasséréner en comprenant qu’elle ne lui voulait aucun mal. Serrant le tissu entre ses doigts fins, il lui adressa un regard reconnaissant qui se teinta d’anxiété lorsqu’elle se releva.
- Ne t’inquiètes pas, le rassura-t-elle. Nous allons rentrer à la maison, d’accord ? Tu vas pouvoir manger, te laver et te réchauffer. Allez, viens.
Elle lui tendit une main amicale qu’il saisit après un instant d’hésitation. Faisant preuve d’une étonnante souplesse malgré la fatigue qui pesait sur ses épaules, il bondit sur ses pieds et nicha sa petite main glacée dans la sienne. Moins d’une minute plus tard, ils avaient rejoint Mole ; mais la suivante dévisagea le garçon d’un air si horrifié, si plein d’épouvante et de répulsion, qu’il se recroquevilla en gémissant.
- Tu lui as fait peur, la rabroua Novinha. Tu ne vois donc pas qu’il est terrifié ?
La vieille servante se signa d’une main tremblante.
- C’est un monstre, balbutia-t-elle. Un démon… Je vous en conjure, ma dame, éloignez-vous de lui !
La jeune femme lui jeta un regard dédaigneux qui la fit frémir.
- Ce n’est pas un monstre, répondit-elle d’un ton glacial. C’est un enfant, avec un œil différent de l’autre certes, mais un enfant ! Un simple enfant, affamé, blessé, frigorifié ! C’est déjà un miracle qu’il ait survécu. Vos stupides superstitions ont peut-être dressé une muraille autour de votre cœur, mais les véritables monstres sont ceux qui le laisseraient mourir !
Mole avait blêmi. Les mots de Novinha avaient agi comme autant de gifles et elle restait pétrifiée, bouche ouverte, incapable d’émettre la moindre protestation. En aurait-elle eu à l’esprit, d’ailleurs, qu’elle n’en aurait rien dit ; elle aurait craint de manquer de respect envers sa maîtresse et, même si elle tendait à penser que celle-ci était devenue folle, jamais elle ne serait permis de répliquer.
- Maintenant, reprit la jeune femme, cours à la maison. Avertis mon père que nous allons avoir un nouveau pensionnaire et ne t’occupes pas de ses hurlements. Prépare un lit dans ma chambre, des vêtements propres et à manger pour cet enfant, et fais-lui couler un bain. Je suis assez claire ?
Par principe, elle n’aimait pas donner des ordres ; cette impression de détenir une autorité écrasante sur la personne d’en face lui était désagréable, mais c’était nécessaire pour que Mole réagisse. La suivante hocha la tête en silence puis se détourna. Elle avait mauvaise conscience de laisser sa maîtresse seule avec cet être étrange, mais les ordres étaient des ordres et elle n’aurait pu envisager une seconde d’y désobéir.
Une fois qu’elle fut partie, Novinha se tourna vers le petit garçon qui avait regardé la vieille servante s’éloigner avec angoisse.
- Ne t’inquiètes pas pour Mole, le rassura-t-elle. C’est une brave femme, au fond ; il lui faut juste le temps de s’habituer à toi… Bien ! reprit-elle. Allons-y, je ne voudrais pas te faire attendre plus longtemps, je… Qu’est-ce qu’il y a ?
L’enfant avait attrapé sa manche et la tiraillait avec insistance. Elle se pencha à sa hauteur, les sourcils froncés. Ses lèvres tressaillirent comme s’il voulait ouvrir la bouche puis, lentement, un faible sourire s’y dessina ; un sourire enfantin, un peu pâlot, comme s’il avait oublié ce que cela faisait d’être joyeux.
Une vague de tendresse noya le cœur de la jeune femme. Elle tendit les bras dans un geste instinctif, irréfléchi, un vieux réflexe enfoui au fond d’elle-même ; sans aucune hésitation cette fois, le petit garçon vint se nicher contre sa poitrine, irradiant une confiance absolue. Elle était sa fée, sa sauveuse, celle qui l’extirpait de la gangue de ténèbres dans laquelle il s’était enfoncé durant ces longs mois d’errance…
La promesse qui circula entre eux n’avait pas besoin de mots pour être exprimée. Lorsqu’il s’écarta enfin, ses yeux brillaient, et la tristesse avait commencé à refluer de son corps.
Main dans la main, ils s’éloignèrent sur le sentier envahi de végétation.

La suite!

Oui, la suite !!! XD
On est pas encore servis qu'on en veut déjà plus !
C'est bien, tu as réussi à continuer ton histoire sans lasser les lecteurs (en tout cas sans me lasser, moi^^) et... c'est si mignooooon !

Pour "Mole", et pour faire moins compliqué que thetchaff, en clair c'est un truc barbare qu'on te fait apprendre de force en 2nde, en physique... mon prof a tout essayé pour me faire rentrer ça dans le crâne, rien n'y a fait : tout ce dont je me souviens, c'est qu'il comparait une mole à un sac de bille (regroupant des atomes je crois ^^). Enfin bref, rien de bien joyeux, quoi... et ça colle donc parfaitement à ce que l'on connait du perso de Mole pour le moment !

Bonne continuation !

Chapeau Naëma ! Je sais pas quoi dire d'autre que Bravo, continue ainsi !

Voilà, on l'attendait, on l'a eu et maintenant on en veut encore !



J'aime bien cette phrase ! Je la trouve très philosophique. J'adore !

Très bien écrit, un texte accrocheur de par la poésie qui en émane, sur cette deuxième partie plus particulièrement.

Pour le moment, on en sait peu sur cette "histoire", reste à savoir que ce cela va donner au fil de l'inspiration et du temps.

Ai-je vraiment besoin de préciser que j'attends de lire la suite ?
Après lecture des fans juste au-dessus, je ne pense pas

Super ! Bravo ! Toutes mes félicitations les plus congratulatoire ! Youpi tralala heu...je suis à cours de synonyme là
Une très bonne suite ^^ bravo

Vraiment chouette, et toujours aussi accrocheur.

Ça rappelle plein de références à plein de bouquins déjà écrit et pourtant on a envie de connaître la suite, quelle qu'elle soit.

Du point de vue rythme, on a l'impression de lire une nouvelle. C'est rapide et les portraits sont finement brossé en quelques traits. C'est un exercice difficile et tu t'en sors brillamment.

...

*Mode jalouse on*

Il y a une faute de frappe dans la partie un.

*Mode jalouse off*

La vache !
Moi j'écrivais quoi à quatorze ans ???

...
A treize ans, j'ai écrit une fanfic de Sonic le Hérisson...
...

Purée, respect, Naëma.

Par contre, je survivrai sans la suite, moi.

*Mode critique littéraire ratée on*

M'alors, serait-ce de la fantasy, cette histoirette qui s'annonce ? Si oui, pourquoi pas. C'est vrai, il y en a beaucoup en circulation, mais c'est pas pour ça qu'il faudrait se priver ! Attention au syndrome Malarmée (à savoir : T'as trop lu de livres et tu fais un petit medley Eddings-Tolkien-Hobb-Chrétien de Troyes-Rowlings sans y ajouter ta papatte d'écrivailleuse) qui guette les débutants (mais je crois avoir compris que tu n'es pas une débutante).
Évidemment, pour diagnostiquer un syndrome de Malarmée, c'est un peu tôt avec si peu de texte à se mettre sous la dent. Attention d'ailleurs, fillette, dans ce milieu, faut pondre de gros pavés pour faire des cycles en vingt-huit volumes pour faire gagner des sousous à ton éditeur. (Et là je me fais lyncher par les vrais amateurs du genre qui savent pertinemment que c'est faux.)
Je ne saurais manquer de me faire lyncher en avançant mon impression galopante qu'on va pouvoir dans la suite relever des clichés monumentaux, ah ben voilà qu'est-ce que je disais, des tomates !

*@now@n évite les tomates*

Je parlais de clichés monumentaux. Donc... Fillette, n'aie pas peur du cliché. Mais sois-en consciente. Tu introduis un "élu-avec-les-pouvoirs-de-la-mort-qui-tue-que-personne-il-a-eu-avant" ? Garde bien en tête que tu n'es pas originale sur ce point précis et que ce n'est pas comme ça que tu exprimeras ta grande imagination. Mais sur autre chose.
Après, je suis d'accord, des repères à peu près stables (des clichés, donc) pour le lecteur, il en faut. Sinon le lecteur est perdu et ton bouquin ne paraît pas dans la bonne collection. (Quoique maintenant ils mettent la SF avec la fantasy... Ils respectent rien, ces enfoirés.)
Sinon, l'histoire en elle-même ? Ah mais moi j'attends la suite pour me prononcer... C'est pas avec un quart de chapitre qu'on fait une critique constructive et recevable...
Hein, quoi ?
Ma critique ne passe pas la censure ?
Quoi, haineuse et jalouse ? Mais non vous faites erreur ! Ma jalousie est sur off !
Mais lâchez-moi mais...

Woah ! Merci beaucoup !

DraW : Toi aussi ? J'avais tellement le ton en tête que j'ai failli la balancer à mon ordinateur...

Blast : Des références ? Oui, plein. Consciemment, ou pas, je pioche dans tous les livres de mon étagère... Les noms, les personnages... Ils me donnent tous une désagréable sensation de déjà-vu. Si ça va, tant mieux, mais je travaille sur les clichés pour essayer de les éviter...
Et ça m'amène à la critique d'@now@n.

@now@n : Merci. Beaucoup. Pour ta critique et tout ce que tu as pointé dedans... Les clichés, je m'en méfie pas mal, mais y en a forcément dans lesquels je tomberai tête la première. Tout comme le coup de "l'élu-avec-les-pouvoirs-de-la-mort-qui-tue-que-personne-il-a-eu-avant", ça va être dur, ça, bon sang. De dévier, ou pas, et de faire dans l'originalité... Je vais essayer. (Essayer j'ai dit. Essayer.)

[quote="@now@n"](Quoique maintenant ils mettent la SF avec la fantasy... Ils respectent rien, ces enfoirés.)[/quote]
Tout à fait d'accord. On s'y retrouve plus dans les librairies.

Et puis conclusion : au boulot !

Au boulot, disais-je.
Voilà la suite. Un peu plus long, mais j'avais rien à faire hier soir, alors...

En espérant que ça vous plaise !

Edit : Texte modifié...

[center]__________________________________________[/center]
Le sentier s’élargit bientôt en une route plus large, mieux entretenue, pavée de pierres grises. En chemin, ils ne croisèrent qu’un vieil homme au dos voûté qui ne leur accorda pas un regard, pressé de rentrer avant la nuit ; car l’hiver avait avancé la venue du soir, et le soleil frôlait la ligne d’horizon. Ils atteignirent la maison alors que les étoiles commençaient à s’allumer dans le ciel.
C’était une large et élégante bâtisse qui aurait mieux mérité le terme de manoir. Haute de deux étages, sans compter le rez-de-chaussée, elle écrasait de son ombre les rares maisons environnantes ; ses murs, construits dans le bois solide d’un mûrier-platane, étaient aussi noirs qu’une volée de corbeau, et la lune nimbait d’argent son toit d’ardoise. Un petit parc s’étendait à l’arrière de la propriété, mais ils n’eurent qu’à traverser une allée bordée de massifs pour atteindre le porche qui, encadré de deux colonnes, donnait accès à une massive porte de chêne.
Novinha toqua avec force puis recula de quelques pas, caressant distraitement les cheveux du petit garçon. Celui-ci s’était collé contre elle, impressionné par le manoir et redoutant par-dessus tout la répulsion qu’il n’allait pas manquer de susciter chez les gens de cette maison.
Des pas se firent entendre, puis le lourd battant s’ouvrit devant eux, découvrant un petit hall d’où partait un bel escalier en colimaçon qui grimpait vers les étages. Elle entra sans marquer d’hésitation et le domestique qui leur avait ouvert partit refermer la porte avant de s’incliner devant sa maîtresse, plein d’une déférence écoeurante.
- Si madame veut bien me donner son manteau… susurra-t-il.
Il sursauta en découvrant l’enfant à qui elle donnait la main.
- Qu’est-ce que…
- Mon invité, coupa-t-elle.
Il afficha une moue dégoûtée.
- Si je puis me permettre, vous avez d’étranges façons de choisir vos invités…
- Eh bien non, tu ne te permets pas, trancha-t-elle.
Sans lui laisser le temps de répliquer, elle commença à monter les escaliers, entraînant le petit garçon à sa suite. Il avait baissé les yeux lorsque le domestique lui avait jeté un regard plein de morgue, et il tremblait ; de honte, de peur. Novinha soupira. Elle craignait que la réaction de l’homme ne soit qu’un avant-goût de ce qu’ils allaient devoir affronter.
Mole les attendait à l’étage, un paquet de linge dans les bras. S’efforçant de ne pas se fixer sur l’enfant, elle se tourna vers sa maîtresse.
- J’ai fait ce que vous m’avez dit, ma dame. La baignoire est pleine, son lit est prêt et j’ai averti la cuisinière de préparer un plat pour votre, heu… protégé.
- Merci, répondit la jeune femme en souriant. Dis-moi, reprit-elle, soudain inquiète, comment a réagi mon père ?
- Le Baron a marmonné quelques mots dans sa barbe mais pas plus, ma dame.
- Il s’assagit, constata Novinha, pensive. Tu peux te retirer, ajouta-t-elle gentiment à l’intention de la servante.
- Merci, ma dame.
Elle entreprit de descendre les escaliers tandis que la jeune femme prenait la direction de la salle de bain. C’était une grande pièce lumineuse et carrelée de blanc, dont un mur entier était occupé par un large miroir ; le petit garçon marqua un temps d’arrêt en l’apercevant puis, effrayé, courut se cacher derrière Novinha qui éclata de rire.
- Ne t’inquiètes pas, le rassura-t-elle. Il ne te fera pas de mal. Regarde…
Ils s’approchèrent de la glace. La jeune femme s’agenouilla à la hauteur de l’enfant et tendit les doigts vers le miroir tandis que son reflet effectuait exactement le même geste.
- Essaie, lui enjoignit-elle. Tu n’as pas à avoir peur.
Hésitant, il l’imita avec plus de retenue. Il sursauta lorsque ses doigts rejoignirent ceux de son double et recula ; il ne semblait pas parvenir à accepter, non, à comprendre qu’il se voyait lui-même. Stupéfaite, Novinha jugea cependant inutile d’insister et l’entraîna vers la grande baignoire qui se dressait au fond de la salle.
D’abord réticent, le petit garçon finit par accepter de s’immerger dans le bain fumant. Mais ses blessures à vif, mises en contact avec l’eau brûlante, lui arrachèrent un cri de douleur enroué ; son visage se contracta et il serra les dents, luttant contre la souffrance qui l’envahissait telle une vague de feu.
- Ça va passer, assura Novinha d’une voix douce. Ne crains rien… Détends-toi. Allonge-toi, voilà, comme ça. Je vais te laver. N’aie pas peur.
Elle se pencha au-dessus de la baignoire et, lentement, entreprit de passer au gant sa peau meurtrie. Elle le lava de la tête au pied, avec douceur et prévenance, éliminant patiemment l’accumulation de crasse et de sueur ; bientôt, l’eau se teinta de gris puis de noir, et il fallut faire couler un deuxième bain avant qu’elle ne puisse continuer sa besogne.
Débarrassée de la saleté qui la recouvrait, la peau de l’enfant paraissait encore plus blanche et ses blessures, encore plus écarlates. Une grande partie aurait mérité d’être désinfectées et soignées ; quant à la balafre de son dos, elle avait pris une teinte inquiétante et la jeune femme se promit de la montrer à un médecin. Un frisson de colère la parcourut lorsqu’elle en découvrit de semblables le long de ses jambes.
De longues traces ensanglantées qui ressemblaient à s’y méprendre à des traces de fouet.
La colère bouillonnait dans son esprit lorsqu’elle passa à son visage puis, enfin, à ses cheveux. Ils étaient dans un état épouvantable ; emmêlés de nœuds inextricables, collés entre eux par la saleté et la sueur, il lui fallut s’y reprendre à plusieurs fois avant qu’ils ne présentent un semblant de propreté.
Lorsqu’elle eut terminé, elle l’enveloppa dans un peignoir chaud et l’emmena jusqu’à sa chambre. Mole y avait préparé un lit pour lui ; et il le regardait avec tant de convoitise qu’elle jugea inutile de le faire attendre plus longtemps. Elle l’aida à enfiler le pyjama posé sur les couvertures et, un air de bonheur béat peint sur le visage, il se glissa entre les draps.
- Tu as faim ? interrogea-t-elle.
Les yeux brillants, il hocha la tête avec ferveur.
- D’accord. Attends-moi ici, je reviens… Ne bouge pas.
Il la suivit des yeux tandis qu’elle sortait de la chambre, la chaude couette ramenée jusqu’à son menton. Une fois la porte refermée, il tourna son attention vers l’endroit où il se trouvait.
C’était une large pièce au sol parqueté et aux murs lambrissés d’un bois clair, auxquels étaient accrochés des cierges qui répandaient une lueur diffuse et chaleureuse. Une grande fenêtre s’ouvrait sur le mur est ; un sapin, tout proche, venait cogner contre le carreau tandis qu’au-dessus la lune veillait paisiblement sur le manoir.
Il fut tiré de son observation par Novinha qui revenait, portant un plateau en équilibre précaire qu’elle déposa sur ses genoux alors qu’il s’adossait à l’oreiller.
- Mange, lui conseilla-t-elle. La nourriture est normalement interdite dans les chambres mais… bah, j’ai déjà tellement transgressé les règles aujourd’hui que ça ne changera pas grand-chose. Allez, régale-toi. Tu… Non !
Il se recroquevilla, penaud. Ignorant le couteau et la fourchette disposés auprès de l’assiette, il avait saisi à pleines mains la tranche de viande préparée pour lui ; consciente que c’était plus par ignorance que par mauvaise volonté, la jeune femme prit le parti de ne pas s’énerver et lui expliqua patiemment comment employer les couverts. Lorsqu’il eût terminé son repas, elle partit ranger le plateau tandis qu’il se lovait sous les couvertures, enfin rassasié.
- Tu peux dormir en toute tranquillité, lui dit-elle en souriant. Personne ne viendra te faire du mal ici. Si tu entends quelqu’un rentrer, tu ne t’inquiètes pas, d’accord ?
Elle déposa un léger baiser sur son front.
- Bonne nuit…
Il ferma les yeux, un sourire de confiance absolue flottant sur ses lèvres. Au moment de quitter la chambre, Novinha se figea, la main sur la poignée de la porte.
Un étrange bruit s’était élevé dans la pièce. Comme un grognement… Un grognement long et doux qu’elle aurait juré avoir déjà entendu quelque part, mais qu’elle ne parvenait pas à identifier.
Sourcils froncés, elle referma la porte en silence et se dirigea vers le bureau de son père.

[center]***[/center]
- Tu n’es qu’une insensée ! explosa le Baron.
C’était un homme entre deux âges, aux tempes grisonnantes et aux petits yeux noirs enfoncés dans leurs orbites. Déjà grand et imposant de nature, il l’était encore plus lorsqu’il se mettait en colère ; pour l’heure, il était debout derrière son bureau, invectivant sa fille qui peinait à garder son sang-froid.
Elle s’efforçait de conserver son calme tandis qu’il gesticulait. D’une part pour ne pas lui cracher à la figure ce qu’elle brûlait de lui dire ; mais surtout pour ne pas éclater de rire, car si les domestiques étaient terrifiés lorsque leur maître se mettait en colère, elle avait du mal à contenir son hilarité devant son visage gonflé et rouge comme une tomate.
- Tu n’as même pas pris la peine de… de me demander ma permission ! s’exclama son père à qui la rage faisait perdre ses mots.
- Nuance, je n’en ai pas eu l’occasion, rétorqua la jeune femme. Je n’allais pas faire l’aller-retour juste pour te le demander, sans même être sûre que tu allais accepter, en le laissant grelotter au… là-bas !
Elle avait délibérément évité de mentionner le temple. Si son père se moquait, comme elle, des superstitions d’Ombreuse, il tenait en revanche beaucoup à son image et abriter chez lui un enfant considéré comme un démon y nuirait certainement.
Malheureusement, il avait perçu son hésitation et, bien qu’ils n’aient peu ou pas de rapports familiaux, il connaissait assez sa fille pour deviner qu’elle lui cachait quelque chose.
- Où as-tu dit que tu l’avais trouvé, déjà ? demanda-t-il d’un ton doucereux.
- Je ne l’ai pas dit, se défendit-elle.
- J’aimerais le savoir.
- Ça… ça n’a pas d’importance.
- Alors tu devrais pouvoir me le dire sans problème, non ?
Novinha sentit qu’elle perdait pied.
- Ou bien est-ce que cet enfant que tu refuses de me montrer vient-il d’un endroit trop peu recommandable pour que tu me le confies ?
Elle se redressa et le défia du regard.
- Il vient d’un endroit que je juge très recommandable, pour reprendre tes propres mots. Mais si je te le dis, tu le chasseras séance tenante et ça, c’est hors de question !
Une mine intéressée se peignit sur le visage du Baron et il devint tout à coup parfaitement sérieux.
- Et si je te promets de ne rien en faire ?
Elle réfléchit.
- Tu le jures sur la mémoire de tes ancêtres ?
Il hésita un instant. Ce n’était pas une promesse que l’on faisait à la légère.
- Je le jure, dit-il enfin. Maintenant, dis-moi où tu…
- Il vient du temple.
Il fronça les sourcils.
- Celui que les villageois évitent comme la peste ?
- Exactement.
- Mais qu’est-ce que tu es allée fiche là-bas, bon sang de bonsoir ! s’exclama-t-il. Et tu… tu…
- J’ai trouvé celui qu’ils craignaient et je me suis sentie incapable de l’y laisser, voilà tout.
Le Baron se laissa tomber sur sa chaise et soupira.
- Mais qu’est-ce que j’ai fait pour mériter une fille pareille… Tu as conscience que tu mets notre réputation en danger ?
- Si je peux me permettre, je préfère jeter cette réputation aux chiens plutôt que de le laisser agoniser là-bas.
- C’est compréhensible. Mais…
- Mais rien du tout, coupa-t-elle, agacée. Tu as juré que tu acceptais de le garder. Et de toute manière, ajouta-t-elle, plus conciliante, tu n’auras pas à t’occuper de lui : j’en prends l’entière responsabilité. D’accord ?
- Parce que tu me donnes le choix, peut-être ? répondit-il avec un sourire las.
- Non, tu as raison. Je vais à la bibliothèque. Merci beaucoup !
Elle déposa un baiser sonore sur sa joue et se dirigea vers la porte. Il ouvrit la bouche pour la rappeler, se ravisa ; il se contenta de la regarder sortir d’un air songeur, lissant pensivement sa courte barbe.

Ouais, c'est chouette. Il y a quelques ouverturs sur l'histoire qui peuvent être interessantes.
Attention à l'écriture. Prend ton temps de bien ciseler tes phrases. Quelques unes au début sont un peu lourdes par l'ajout de mots superflus (exemples : en effet ; Le toit était fait d’ardoise grise et donnait...).
Prend ton temps

C'est toujours aussi bien écrit, mais j'ai trouvé la promesse du Baron un peu curieuse.